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Lettre écrite aux autorités par un Noir représentant ses compagnons le 28 septembre 1789 lors des troubles qui secouent la Martinique,

conservée au Centre des Archives d’Outre-mer, col. C8 A89, fol. 68.

Ce document constitue une rareté, car peu de récits d'esclaves ont été conservés (volontairement ou non), mais aussi car tous les esclaves n'étaient pas capables de rédiger de cette façon.  L'auteur réclame la liberté pour lui et ses frères au nom de l'égalité et de la dignité. Il montre aussi qu'ils sont prêts à prendre les armes. L'influence de la Révolution Française qui a débuté quelques mois plus tôt se fait sentir dans cet écrit. 

Analyse du texte par Hugo D. et Gérald A.

« Messieurs,

Général, intendant, gouvernement, conseillers et autres particuliers, nous savons que nous sommes libres, et vous souffrez que ces peuples rebelles résistent aux ordres du roi. Eh bien, souvenez-vous que Nous, Nègres, tous, tant que nous sommes, nous voulons périr pour cette liberté, car nous voulons et prétendons de l’avoir à quelque prix que ce puisse être, même à la faveur des mortiers, canons et fusils. Comment, depuis combien de centaines d’années nos pères ont été assujettis à ce soir qui rejaillit jusqu’à présent sur nous ? Est-ce que   le Bon Dieu a créé quelqu’un esclave ? Le ciel et la terre appartiennent au Seigneur Dieu ainsi que tout ce qu’il renferme, vous avez suborné nos précédents, non seulement eux, mais encore leurs descendants, cela n’est-il pas horrible, Messieurs, il faut croire en vérité que vous soyez bien inhumains pour ne pas être touchés par la commisération des souffrances que nous endurons, la Nation même la plus barbare fondrait en larmes si elle savait nos maux ; je vous laisse un peu à penser avec quelle promptitude   chercherait-elle à abolir une loi si odieuse, enfin c’est en vain que nous prenons par des motifs de sentiment et d’humanité, car vous n’en avez pas, mais à la faveur des coups nous l’aurons, car nous voyons que c’est le seul moyen d’en venir à bout…Il en sortira avant peu, si ce préjugé n’est pas entièrement anéanti, autant d’une part que de l’autre, des torrents de sang qui couleront aussi puissants que nos ruisseaux qui coulent le long des rues ; mais le gouvernement et les monastères seront respectés.

Messieurs, Nous avons l’honneur d’être signés par Nous Nègres ».

 

 

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